C'est la boucherie. Plusieurs types se sont pointés et j'en ai descendu deux, je suis sûr d'en avoir touché un troisième mais cette dernière cible continue à bouger. Je jure dans ma barbe malgré tout, même si ce n'est que pour la forme. Je devrais plutôt être satisfait ; on a localisé l'objectif et on est en chemin pour le sécuriser tout à fait. L'arrivée impromptue de ces salauds ne nous empêche pas de les démonter. La fusillade se fait plus intense quand d'autres petits plaisantins se joignent à la partie. Les tirs piaulent et griffent sèchent les cloisons, voire ricochent parfois, ce qui ajoute encore à la confusion des échanges de tir. Mais les types se sont déjà fait avoir ; je vois Jeyn à mon côté qui se redresse, vise et lâche deux ou trois tirs et j'entends un grognement de l'autre côté du couloir. C'est en passant la tête sur le côté que je constate qu'ils sont tous abattus, et qu'on a encore un peu plus de compagnie féminine. Hope. Une autre transfuge de l'Empire, comme moi. Sauf que je suis presque certain qu'elle est infiniment plus convaincue que moi par sa nouvelle allégeance. Peu importe. Nous sommes trois, nous sommes efficaces et nous avons neutralisé la menace qui pesait sur nous. Il ne reste « plus » finalement qu'à aller charger la bête. Hope se rapproche, nous demande comment ça va. Je la fixe du regard, me tenant l'avant-bras griffé par un tir.


| Ca va, on a le paquet et ces connards ne nous emmerderont plus. |



Nous nous rapprochons encore de notre objectif final, mais je me fige en entendant le vacarme de nouveaux tirs, et d'une explosion. Ca, c'est l'autre équipe qui a des emmerdes. Le soldat que je suis, formaté depuis vingt cinq ans, me souffle que nous avons rempli l'objectif et que les pertes sont acceptables. L'impérial que je suis me murmure qu'en plus, ça ferait quelques résistants de moins. Mais voilà que je doute. Me comporter en bon résistant, c'est jouer au héros, non ? On a déjà accompli ce qu'on était venu faire, sans une seule bavure. Et j'aligne deux têtes de plus à mon tableau de chasse. Deux têtes de camarades. Un jour, je m'en sortirais dans ma tête, dans mon dilemme permanent. Mais tout ce que je fais aujourd'hui semble appeler à plus encore de confusion. J'échange  un regard avec Kathleen alors que ses appels restent sans réponse. Et lorsque la porte s'ouvre, scène de guerre. Je crache un juron, réarmant mon blaster. Kathleen dit à Jeyn qu'on la couvre et mon regard se porte sur la jeune fantôme.


| Allez fillette, pose ton cul sur ce siège et amène-nous ça dans le vaisseau. On s'occupe du reste. |


Là, on risque gros. Mais étonnament je n'ai aucun regret. L'alarme se déclenche. Des hostiles sont partout. Je serre les dents et cherche une cible alors que Kathleen s'effondre. Les autres sont touchés aussi. Par Feth, c'est la merde. Je me tourne vers Bandat.


| Ne t'arrête pas. Ces abrutis sont disciplinés ; ils éviteront de te tirer dessus pour ne pas se vaporiser. Fonce, et si jamais on n'arrive pas très vite, tire-toi sans nous, tu sais piloter ! |


Elle va rétorquer mais je la fixe durement, même si j'ai envie de me tirer avec elle.


| C'est un ordre, fantôme. |


Ton sans réplique. Je rebascule sur le grand espace. Inutile, malheureusement, de porter immédiatement secours à nos camarades ; je me ferais tirer par un lapin. Je braque mon arme devant moi, contourne le véhicule qui avance droit devant de toute la vitesse dont il est capable. Un premier hostile. Bang. Il est touché et se tient le côté. Je pivote, cherchant une autre cible prioritaire. Je l'identifie sur le flanc droit au moment où un laser me touche à l'épaule mais au même instant, mon tir fuse et le frappe en plein visage. Je grogne, titube. Jeyn regarde en arrière depuis l'habitacle.


| Fonce! |


Un touché, un abattu. Combien encore ? Un, deux ? Je peux le faire. Je serre les dents et recharge mon blaster. Venez enfoirés, faites-moi plaisir!

Hors de question d'abandonner. De toute manière, le voudrais-je que j'en serais parfaitement incapable ; l'adrénaline est trop forte, la décharge d'énergie trop puissante. Je suis dans mon élément dans la fusillade. Mon équipe agonise par terre, des types blessés partout, d'autres qui leur viennent en aide. Même Hope s'est fait toucher. Moi aussi. Mais c'est superficiel. Je serre les dents et je continue alors que je descends un mec de plus et en touche un autre. Je rétablis un peu l'équilibre des forces, mais ça ne sera jamais suffisant si je suis forcé de continuer comme ça. J'ai l'impression pourtant que la fusillade décline tout à fait maintenant. J'ai dû faire pencher la balance sans le savoir. Il aurait été étonnant aussi que Noxis, Thrawkos et les autres n'en touchent pas quelques uns dans la bagarre, et je ne voyais plus des départs de tir que d'une position. Mais la situation évolue dans la confusion, entre grenades incapacitantes et rafales de lasers ; des hommes d'équipage se pointent.


Grenade.


Je le sens dans mes tripes alors que mes yeux ne voient plus, que l'ouïe défoncée par l'onde sonore ne me fasse perdre toute conscience de mon environnement. Je titube et m'effondre, l'équilibre totalement en vrac. Saloperies de grenades de merde. Lorsque le son strident, le sifflement aigue de mes tympans se calme un peu, je redresse un regard vacillant vers le véhicule de Jeyn. Qui traverse une véritable tempête de lasers. Un laser qui pénètre l'habitacle suivi d'un cri. Je hurle une dénégation violente qui résonne dans le hangar. J'empoigne mon blaster, étouffe un grognement et me hisse de nouveau sur mes jambes. Les salopards. Noxis hurle aux pécores du vaisseau de nous laisser régler nos petites affaires. Couillu le type. A sa place, je les aurais descendus. Tout ce qu'il récolte le pauvre, c'est un nouveau tir dans la tronche. Il va finir en barbecue vivant s'il continue à ce rythme. Je réarme mon flingue et Hope me dit qu'on doit neutraliser cet impérial. Je coule un regard noir dans sa direction.


| Je ne comptais pas laisser ce fils de pute s'en tirer vivant. |


Je laisse Hope ouvrir la danse, jaugeant du regard la situation pour éviter qu'on se fasse tirer dessus pas ces connards de marchands de l'espace pendant qu'on fait la peau à l'autre enfoiré. Tiens c'est étrange, je ne considère plus du tout le mec d'en face comme un ami et un allié potentiel. Je vais le tuer, ou en tous cas je ne partirais pas avant de le savoir mort. Les tirs fusent et la jeune femme touche l'ennemi.


| Ce connard est pour moi. |


Il essaie de ramper à couvert. J'aligne ma mire. Je presse la détente plusieurs fois et le mec au centre réplique. Je serre les dents quand un tir me frôle le visage et m'égratigne le cuir chevelu. Je suis un peu sonné par le tir, impossible de dire si mes coups ont mis au but.

Allez, c'est parti. Mes tirs touchent le type et il est frappé à deux reprises par les éclairs lumineux que je lui envoie en direction de sa poire. Je ne sais pas s'il est grillé sur place mais quand il tombe, ça semble être pour de bon. Je ne vais pas chercher plus loin hein... J'ai ce que je voulais, je suis peut être un tueur sociopathe mais je ne serais jamais inutilement cruel, là dessus vous pouvez y compter. Les tirs se généralisent à nouveau et l'échange de tir se renforce ; il n'y a pas besoin d'aller plus loin que ça, les salopards du coin nous prennent pour les nouvelles cibles à abattre. Génial, quoi. Après avoir grillé comme des steaks l'équivalent d'un groupe de combat impérial de reconnaissance, on se retrouve confronté à l'équipage. Un éuqipage qui se dirige tout droit vers Bastion. Alors on me fera pas croire à la neutralité du marchand, ces connards engraissent l'Empire en s'engraissant eux mêmes et je ne suis pas du genre à laisser passer ça au motif du « on doit tuer personne on est les gentils ». Je suis pas gentil, et je me fiche bien de l'image des unités d'intervention de la Résistance. Tant qu'on éliminera pas de planètes entières comme mon camp d'origine, qu'on vienne pas me chier dans les bottes. Il n'empêche que ce retournement de situation induit une certaine évolution tactique, bien peu enviable. J'entends la voix de Jeyn qui grésille dans mon oreillette. On a une mission. Pour quelqu'un comme moi qui a passé sa vie à servir, c'est quelque chose d'assez sacré. Je connais la valeur du sacrifice. Je réponds dans un souffle.


| Fais tout péter, chérie. |


Je prends sur moi la responsabilité de la fin de cette mission. Tant pis si on y reste, tant pis si on est capturés. La mission aurait pu être accomplie avec moins d'opposition ; avec Jeyn et Kathleen nous avions su trouver la cargaison puis l'amener presque au bout. La seconde équipe s'était fait dessouder et ça, c'était pas prévu. J'étais blessé légèrement maintenant, Kat' et Jeyn aussi. On ne tiendra plus longtemps.


| Code Terre Brûlée Bandat, et en vitesse. |